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À N’Djamena, lorsque le soleil s’efface derrière les toits poussiéreux et que la ville ralentit, une autre réalité se réveille. Elle avance à pas nus, couchée sur des cartons, dissimulée sous des couvertures déchirées. C’est celle des enfants livrés à eux-mêmes, abandonnés au froid, aux moustiques, aux dangers, et à l’indifférence.
Sous le porche de l’hôpital (la Renaissance ), Ali et Moussa et trois autres comptent les heures qui les séparent du matin. Leurs silhouettes frêles se confondent avec les marches glacées du bâtiment. Ici, la nuit, le prestige de l’hôpital disparaît : il ne reste que des enfants tentant de survivre, le regard tourné vers un avenir qu’ils ne voient plus.Le jour venu, ils se dispersent autour des restaurants.Ils protègent les motos des clients avec des cartons, espérant en retour quelques pièces, parfois un reste de la nourriture laissé par un serveur compatissant. « Si on ne sort pas, on ne mange pas », glisse Ali, 11 ans, d’une voix trop mature pour son âge.
À l’autre bout de la ville, à l’école de Dembé, Adoum, Juco et Julien se partagent un coin de cour, au milieu des salles de classe qu’ils ne fréquenteront sans doute jamais. Leurs histoires sont différentes, mais leurs nuits se ressemblent. Certains ont fui un foyer devenu hostile. D’autres ont perdu leurs parents et, avec eux, leur place dans la société.
Pourtant, N’Djamena ne manque pas totalement de structures d’accueil : SOS Villages d’Enfants, l’orphelinat Béthanie, plusieurs centres de réinsertion, et la Direction de l’Enfance au ministère de l’Action sociale. Mais leurs moyens sont trop maigres pour affronter l’ampleur du phénomène. Les lits ne suffisent pas. Les équipes non plus. Les suivis se perdent, comme les enfants.
Chaque soir, de nouveaux visages rejoignent la rue. Chaque matin, les mêmes regards cherchent une main qu’ils ne trouvent pas.
Dans les quartiers, les acteurs sociaux tirent la sonnette d’alarme. Ils appellent non seulement à renforcer les structures, mais surtout à bâtir une véritable stratégie : repérer, écouter, accompagner, suivre. Sortir ces enfants de la rue ne peut plus relever de la seule bonne volonté : c’est une urgence nationale.Car derrière chaque petit corps endormi sur un carton, il y a plus qu’un enfant de la rue.Il y a une vie encore possible.
Une histoire encore sauvable.Un citoyen que le Tchad ne peut se permettre d’abandonner.
Â
Hassaballah Ahmat Khamis

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